MAGNUM PHOTOS ET LES ABUS SEXUELS SUR MINEUR·ES

Titre original :
Olivia Arthur – now can we talk about Magnum Photos and child abuse?
par Benjamin Chesterton.
Benjamin Chesterton est un ancien producteur de documentaires
de la BBC et le co-fondateur de la société de production Duckrabbit.
Il travaille actuellement à un film sur l’unité d’Interpol chargée des abus sexuels sur les enfants et écrit depuis plus de dix ans sur les pratiques abusives dans le domaine de la photographie.
Traduit avec l’autorisation de l’auteur par LaPartDesFemmes

Attention : Ce billet contient des détails choquants sur des images d’abus sexuels d’enfants, ainsi que sur la violence sexuelle contre les femmes. Les images potentiellement indécentes ont été signalées aux autorités compétentes en 2020. L’auteur a modifié ces images pour protéger l’identité des enfants qui y figurent. Le post qui suit est adressé à Olivia Arthur.  En tant que présidente de Magnum Photos (depuis 2020), elle est chargée de faire respecter le code de conduite de l’agence.

Eléments de contexte :

En 2017, Magnum photos a organisé un concours photo, commercialisé sur Facebook illustré par une photo de Souvid Datta montrant un enfant indien ayant possiblement été violé. Les réactions ont été violentes lorsque l’industrie du photo journalisme s’est réveillée et a découvert qu’il n’y avait pas que les délinquants sexuels qui valorisaient les hommes qui photographient des photos d’enfants violés.

Deux hommes ont décidé d’agir. Robert Godden (Rights Exposure, anciennement Amnesty) et Jason Tanner (Human Rights For Journalism) ont lancé une campagne visant à introduire des normes très élémentaires de protection des enfants dans l’industrie.

« Même un examen superficiel des travaux photographiques réalisés au cours des cinq dernières années révèle au moins une demi-douzaine d’exemples de travaux dans lesquels des enfants ont sans doute été exploités, mis en danger et/ou les lois sur la protection de l’enfance peuvent avoir été enfreintes. Où est la réponse claire, sans équivoque et directrice des dirigeants de l’industrie, qui condamnent ces images et montrent la voie à suivre pour favoriser le changement ? Pouvons-nous dire avec certitude que nous savons même repérer les photos qui posent problème et qui nécessitent une enquête plus approfondie” ?

Robert Godden – Témoin (World Press Photo)

Magnum photos a été l’une des rares agences à réagir :

“La protection des enfants vulnérables et maltraités est d’une importance capitale pour Magnum Photos … l’agence prend le temps de réfléchir à la manière dont ces recommandations guident la production des travaux, et s’appliquent à nos archives, à nos nouvelles initiatives de publication … Le personnel et les photographes de Magnum continueront à discuter de ces sujets au cours des semaines et des mois à venir, en examinant chaque aspect du problème, à tour de rôle, pour s’assurer que nous mettons en lumière les domaines concernés”.

Fiona Rogers, Magnum Photos

Ça, c’est la belle histoire.
Voici la vérité.

« Bonjour Olivia,
Ça fait plus de cinq mois que j’ai soulevé pour la première fois le fait que Magnum Photos cherchait à tirer profit en exposant des enfants survivants d’abus sexuels. J’ai envoyé le lien à un enquêteur spécialisé dans la pédophilie en ligne qui travaille pour une agence internationale s’occupant de pédophilie en ligne. Il m’a dit que ce qui l’inquiétait le plus, c’était la normalisation des abus sur les enfants. Je suis rentré à la maison, j’ai ouvert vos archives et voilà : la normalisation de la maltraitance des enfants.
Tout est possible. Pour le profit. Il suffit de l’emballer sous le nom de “photojournalisme”. Et vendre.
J’ai fait des captures d’écran. Je me suis assis devant mon ordinateur. J’ai tweeté.”
(tweet du 3 août 2020)

Racisme structurel. Les archives de MagnumPhotos ont un nombre énorme d’enfants identifiables forcés à avoir des relations sexuelles. Certains ont les mains levées pour cacher leur identité. Tous dans des pays en développement. Pas d’image US, pas de photos UK. En Grande Bretagne, si vous faisiez ça, vous seriez arrêtés.

Le journaliste Andy Day a vu mon tweet et a commencé à enquêter sur votre agence le lendemain. Il a extrait les photos de “l’enfant prostitué thaïlandais” du photographe Magnum David Alan Harvey et a commencé à écrire :
«Les archives de Magnum Photos contiennent de nombreuses photographies d’enfants travailleurs du sexe, dont beaucoup ont été photographiées à leur insu. Plusieurs de ces photographies sont sexuellement explicites, mettant en scène de la nudité et des rencontres avec des clients. Ces images peuvent constituer des actes d’abus sexuels sur des enfants. » Andy Day / Fstoppers

En quelques jours, vous avez publié une déclaration promettant un examen en interne et avez mis les archives hors ligne (pendant deux semaines) afin de masquer la colère croissante face au grand nombre d’images où, pour citer Godden, “les enfants ont sans doute été exploités, mis en danger et/ou les lois sur la protection des enfants peuvent avoir été enfreintes“.

Cela fait plus de cinq mois maintenant. Vous avez annoncé nettoyer la maison Magnum. Certains ont cru à votre sincérité. D’autres non. Surtout ceux qui ont noté que deux mots manquaient dans cette déclaration et toutes celles écrites depuis :

abus sur mineur.

Je veux en parler car comme vous le savez, cela va beaucoup plus loin que David Alan Harvey, le seul photographe sur lequel Magnum a fait des commentaires publics. Dans cet article, j’écris sur Chris Steele Perkins, Antoine d’Agata, Martin Parr, Cristina de Middel, Stuart Franklin, Larry Towell, Paolo Pellegrin et Patrick Zachmann.
Commençons par Harvey.

  1. David Alan Harvey
  2. Chris Steele Perkins
  3. Antoine d’Agata
  4. Stuart Franklin
  5. Larry Towell
  6. Paolo Pellegrin
  7. Patrick Zachmann

1: David Alan Harvey

Peu de temps après vous avoir écrit pour la première fois l’année dernière, le Guardian a rapporté que Harvey avait été suspendu pour avoir prétendument harcelé une collègue. Selon l’article, Magnum ne le représenterait pas durant sa suspension. Sauf que Magnum a continué de défendre Harvey contre l’allégation antérieure selon laquelle il aurait fait des photos de nombreux enfants thaïlandais nus ou demi-nus, dans des chambres d’hôtel, pour les vendre sur une galerie de Magnum sous le titre de «Prostitué·es de Bangkok». La semaine suivante, Magnum écrivait au journaliste Andy Day :

Magnum écrit : – les sujets présentés dans l’album “THAÏLANDE. Bangkok Prostitutes” de David Alan Harvey étaient tous des danseurs et des employés de bar, et ne vendaient pas de sexe. – tous les sujets avaient plus de 18 ans (à la connaissance de DAH) – les images ont été mal référencées.

Votre porte-parole a ensuite écrit : «Il semble qu’à un moment donné, une erreur de classification de ces photos vous a conduit à une conclusion erronée selon laquelle elles représentent quelque chose qu’elles ne représentent pas.» Aucune des photos n’était taguée ou associée aux mots-clés «danseur» ou «employé de bar» par Magnum Photos.

Comme je l’ai écrit dans un e-mail à Harvey le 23 août : «Tu devrais être en mesure de prouver que ce ne sont pas des enfants. Au lieu de ça, les gens de la communication de crise de Magnum diffusent des conneries : «l’adolescente» à moitié nue dans ta chambre (laissant croire que c’était ta chambre d’hôtel) serait juste un «serveuse de bar» ou une «danseuse» et non une «prostituée» adolescente. Malgré le fait que la galerie le précise. Purée, mais tu peux faire mieux que ça ? Ou l’ont-ils juste inventé ? »

Il n’a pas répondu. Je suppose qu’il est resté collé au code de bonne conduite de Magnum que vous êtes chargée de faire respecter (celui d’origine que vous avez refusé à plusieurs reprises de publier) : le silence.

Malgré la suspension de Harvey, vous n’avez pas arrêté de commercialiser son travail. Ses images d ’« enfants prostitués » ont continué d’être commercialisées « pour téléchargement immédiat » sur les sites web partenaires, y compris le site polonais PhotoPower :

Ça ne s’est pas arrêté là.
En août, vous avez dit au Guardian : «Nous avons été alertés sur le matériel historique dans nos archives qui est problématique… et nous prenons cela très au sérieux». Si sérieusement en fait que, quelques quatre-vingts jours après l’annonce de la suspension de Harvey, les photos thaïlandaises étaient toujours en vente sur le site Web de votre diffuseur ANP (la plus grande agence de presse néerlandaise).

Êtes-vous arrivée à la conclusion que le moindre des maux est que ce ne sont pas des enfants vendus dans vos archives comme des «prostituées», mais des barmen/serveuses thaïlandais·es adultes que Magnum a malencontreusement étiquetées «enfants prostitués»?

Pendant que vous avez cette idée absurde, Magnum Photos a continué à commercialiser les images étiquetées «adolescent» et «prostituée» sur plusieurs sites partenaires. Photos remontées avec la recherche «enfant prostitué», dont l’une est toujours présente sur une galerie de photos de site Web d’information (Slate) sous-titrée «prostituée». À un moment donné, votre DG Caitlyn Hughes a dû se rendre compte que même les fanboys les plus dupes de Magnum n’allaient pas gober cet argument.

Selon l’enquête de Kristen Chick du “Columbia Journalism Reviews” sur Harvey, Hughes déclare que Magnum «essaie toujours de déterminer si les sujets des photos étaient mineurs au moment où elles ont été photographiées et comment les photos ont été étiquetées». Après plus de cinq mois au cours desquels vous avez embauché trois groupes d’avocats et un cabinet de communication de crise, il est vraiment difficile de croire que ces photos font toujours l’objet d’une «enquête».

Encore une fois, le moindre des maux. L’incompétence de Magnum en terme de vraie transparence.

Une fois que vos avocats vous ont dit qu’il n’y avait pas de raisons d’expulser Harvey de Magnum, car aucune femme extérieure à Magnum ne ferait suffisamment confiance à votre “enquête” pour parler, une suspension de douze mois a-t-elle permis un compromis acceptable ? pour les deux parties ? Non. Blâmons simplement le système d’indexation que personne chez Magnum ne peut expliquer. Un système dans laquelle des petites filles nues ont été étiquetées «vulve» et «vagin» et «prostituée»

Et on en aurait fini, n’est-ce pas, s’il n’y avait pas eu l’enquête de Kristen Chick, dans laquelle 11 femmes ont accusé Harvey d’abus de pouvoir. À ce stade, vous n’aviez pas d’autre choix que de le jeter sous un bus qui aurait probablement dû l’écraser lorsque les photos de «l’enfant prostitué» thaïlandais ont été téléchargées pour la première fois sur votre serveur.

Et c’est le problème. Magnum ne l’a pas fait. L’agence que vous dirigez a doublé sa contribution et a tiré profit de l’exploitation des enfants par Harvey. Pour le profit. Depuis des décennies.

Voici comment le directeur de l’éducation mondiale de Magnum a annoncé un atelier Magnum avec Harvey sur Facebook en février 2017 : «Nous reprenons un petit loft à London Fields pour une session intensive de revue de portfolio et de bons moments avec le seul et unique David Alan Harvey! Fais gaffe Londres ! »

Juste afin de prendre un peu de hauteur, j’ai entendu parler pour la première fois de la réputation de Harvey en tant que prédateur sexuel il y a dix ans. Parce que quelqu’un l’a ouvertement interpellé sur Twitter. Vous n’êtes donc pas surprise que l’une des femmes qui a cherché le mentorat d’un photographe Magnum et qui a fini avec un homme de cinquante ans plus âgé en train de se masturber sur skype, ait ceci à dire à propos de votre agence :

Une fois, j’ai eu trop peur de m’inscrire. Maintenant je peux dire fièrement Va te faire foutre @MagnumPhotos & DAH pour avoir mis votre réputation au-dessus de notre sécurité. Nous méritons mieux.

2 – Chris Steele-Perkins

Dans votre déclaration, vous avez écrit : «Nous avons entamé un processus d’examen interne approfondi – avec des conseillers extérieurs – pour nous assurer que nous comprenons pleinement les implications du travail sur les archives, à la fois en termes d’images et de contexte».

Eh bien, définissons le contexte d’une photo de Chris Steele-Perkins que Martin Parr et Cristina de Middel ont incluse dans le livre publié par La Fabrica “Players: Magnum Photogs Come Out To Play”.

À onze ans, on m’a proposé une place à l’école indépendante (payante) Trent College dans le cadre du programme “Thatcher’s Assisted Place”. L’une des premières leçons que nous avons apprises a été le surnom du professeur de mathématiques junior : Paedo.

Comme de nombreuses écoles publiques, Trent avait sa propre piscine. Paedo n’était pas seulement un professeur de mathématiques, il emmenait également les jeunes garçons aux cours de natation et a dirigé un club de natation extra scolaire. Uniquement pour les jeunes garçons, les plus pré pubères. C’est là qu’il a obtenu son surnom. En tant que nouveaux élèves, nous avons été avertis qu’il aimait que les garçons nagent nus. Il se prétendait «naturiste». Et regarder les garçons dans les douches et s’attarder dans le vestiaire. Il avait une maison juste en face de l’école. Nous avons été avertis de ne jamais y aller. J’ai l’image de sa porte en bois fixée dans mon esprit. Paedo n’était pas le seul, Olivia. Il y avait M. O’Gorman, mon professeur de chimie, qui emmenait des garçons en barque le week-end. Et M. Edmonds. Je me souviens encore de son gros visage rouge et souriant, essayant de vous inciter à monter les escaliers de son appartement pour une boisson alcoolisée. Il y en avait d’autres.

Je n’oublierai pas le jour de 1988 où nous avons été convoqués dans une réunion scolaire. Le directeur nous a dit que l’école allait être citée dans les journaux. Pas de détails sur le pourquoi. Mais ce que nous avions vraiment besoin de savoir, c’est qu’en aucun cas nous ne devions parler à un journaliste s’il nous approchait. C’était ça. Pas de : «désolé, nous avons autorisé des pédophiles à enseigner et à abuser des élèves dans d’autres écoles”. Pas de définition de ce que pourrait être un comportement inapproprié la part de l’enseignant et “venez parler en toute confiance si quelque chose vous a pu vous arriver de loin” . Aucune offre d’aide pour un enfant qui aurait pu être affecté. Ce qui, quand on sait le nombre de garçons obligés de se déshabiller, nager nus, se doucher devant des pédophiles, violés lors de voyages en barque, agressés sexuellement durant l’étude, alcoolisés et violés dans les locaux de l’école et agressés sexuellement durant les cours de musique, m’a beaucoup informé sur la façon dont les institutions agissent lorsqu’elles sont accusées de couvrir des pédophiles. Ils les protègent, Olivia, à moins qu’ils ne soient poussés à les chasser à coups de pied et à crier à la vérité. Ça vous parait familier ? C’est là que le journalisme actuel a un rôle si profondément important à jouer.

O’Gorman et M. Edmonds (qui avaient été tranquillement mutés de Trent avec une lettre de recommandation) sont tombés pour plusieurs cas de sodomie (viol). Paedo et un certain nombre d’autres enseignants ont tout simplement disparu. Rien n’a jamais été dit à ce sujet, mais des années plus tard, l’école est toujours poursuivie. Et les enfants devenus adultes se réveillent avec des sueurs nocturnes. Dans les histoires d’abus d’enfants à maintes reprises, la piscine et les douches / salles de bains apparaissent. L’enquête indépendante actuelle sur la maltraitance sur enfants commence à raconter certaines de ces histoires déchirantes : «Steven raconte comment les étudiants de première année étaient placés dans des dortoirs et pris en charge par un prêtre gentil. Cependant, ce prêtre était parfois absent de l’école, et un prêtre plus âgé et hostile, le père Eamon, prenait sa place. Une fois, Steven est allé dans l’une des salles de bains du dortoir et a trouvé le père Eamon qui l’attendait. Le prêtre s’assit sur le bord du bain et insista pour que Steven se déshabille et se baigne devant lui. Steven dit qu’il s’est senti très mal à l’aise, mais n’en a jamais parlé à personne. Le père Eamon s’est comporté de la même manière avec les autres élèves de l’école. Il était toujours là tôt le matin lorsque les garçons se douchaient ou nageaient et il insistait pour que les garçons nagent nus. »

L’une des pratiques que l’enquête définit comme abus sexuels consiste à «conditionner un enfant à l’abus».

À un moment donné, en 1974, le photographe de Magnum Chris Steele-Perkins a obtenu l’autorisation de photographier des garçons dans la piscine de la City Of London School. Des garçons dont les parents ont payé pour qu’ils soient pris en charge n’avaient certainement aucune idée de ce qui s’y passait.

Je suis tombé sur la photo pour la première fois sur le site web de La Fabrica où elle était utilisée pour promouvoir le livre “Players : Magnum Photogs Come Out To Play”.

C’est une image de conditionnement. Abus sexuel d’enfants. Un document extraordinaire. Martin Parr, ou Middel, auraient dû le savoir. Aucun des deux ne s’est soucié de se demander ce qui se passe sur cette image. Ou l’impact dévastateur, en tant qu’adulte, que la photo pourrait avoir.

La photo était également en vente sur les archives Magnum et sur des sites partenaires jusqu’à ce que je commence à poser des questions à ce sujet publiquement. Après quoi, les noms de Parr et Middel ont mystérieusement été supprimés de la page de vente du livre. J’ai demandé à La Fabrica pourquoi leurs noms et la page avaient été mystérieusement supprimés pour réapparaître avec un titre de livre modifié et Parr et Middel réapparus en tant qu’éditeurs.

C’est typique. Retirez des photos et faites semblant publiquement que ça n’a jamais existé. Sauf bien sûr que ça a existé.

Le photographe de Magnum, Chris Steele-Perkins, s’est rendu dans une école de Londres pour prendre une photo de garçons nus en train de nager (aucune autre photo de l’école ne se trouve en ligne). De pire en pire.

À un moment donné, à la fin des années soixante, un homme du nom d’Alan Doggett a enseigné dans cette école. Doggett était probablement l’un des agresseurs d’enfants les plus prolifiques du Royaume-Uni. Il était auparavant chef de chœur à la célèbre école St Paul, d’où on lui a demandé de partir pour avoir maltraité des enfants et ses activités se sont arrêtées. Doggett s’est retrouvé à la City of London School, où l’on pense qu’il était impliqué dans l’entraînement de sports nautiques. Et en 1978, il s’est suicidé après avoir été accusé d’agression sexuelle sur un enfant (sans lien avec son passage à la City Of London School). Il n’a jamais fait face à la justice.

L’année dernière, j’ai été contacté par un homme qui a vu mes tweets. Il est allé dans une école très similaire, à peu près au même moment où cette photo a été prise. Je lui ai envoyé la photo. Il savait exactement ce que c’était et m’a écrit ceci (utilisé avec permission):

Cette photographie représente exactement le contexte que j’ai moi-même vécu, où des agresseurs en charge d’enseigner ont amené les garçons à penser que l’exploitation sexuelle faisait partie intégrante de la culture violente des écoles publiques britanniques, de la nudité collective publique aux abus sexuels ciblés.

Abus sexuel d’enfants.

Dans le livre, la photo est juxtaposée à une belle photo de Christina Garcia Rodero de jeunes enfants jouant à la plage (l’un d’eux nu). L’effet obtenu par Parr et Middel en mettant les deux scènes ensemble est la normalisation de ce qui s’est passé à la piscine.

Maintenant, lisez les mots utilisés pour commercialiser le livre et mettez les en relation avec ce qu’a fait Chris Steele-Perkins :

“Pour dépasser les règles et le culte qui ont caractérisé le développement de la photographie depuis ses débuts, il faut transgresser, inventer, jouer et flirter avec la liberté … il y a toujours des auteurs, surtout dans les nouvelles générations, pour enfreindre les règles sans justification, juste par curiosité, en cherchant à s’amuser et à le représenter.”

La maltraitance des enfants emballée et vendue à but lucratif, c’est «amusant».

J’ai écrit au directeur de la publication La Fabrica, Camino Brasa, pour lui demander d’expliquer comment la photo a été publiée (lettre ici). Il n’a pas répondu. Ni Parr ni Middel n’ont répondu à mes tweets.

Middel a signé, aux côtés de plus de 600 professionnels de l’industrie, la récente tribune «appelant à une responsabilité collective contre le harcèlement sexuel dans la photographie» qui comprend ces mots importants :

“Magnum Photos doit assumer l’entière responsabilité sur toutes toutes les questions éthiques concernant la conduite de ses membres, ainsi que les pratiques institutionnelles qui ont soulevé des inquiétudes alarmantes concernant l’exploitation des mineurs. Ces deux questions exigent une mesure d’urgence égale car elles reflètent des inégalités de pouvoir profondes et systémiques qui peuvent créer les conditions qui facilitent les abus.”

Il est décevant que Middel soit resté silencieuse sur cette photo. Si elle est sincère en signant la tribune, elle doit dire publiquement comment l’image a été ajoutée au livre et quelles mesures elle a prises lorsqu’elle a pris conscience du contexte de la photo.

Le 20 août, Steele-Perkins a donné une conférence en ligne organisée par la Royal Photographic Society, trois jours seulement après que vous ayez mis vos archives hors ligne en raison d’images présumées d’abus sexuels sur des enfants. Son discours portait en partie sur des images d’enfants africains confiés à Human Rights Watch. Lorsque le public a posé des questions, j’ai écrit :

“Je suis un énorme fan de votre travail Chris. J’adore ces photos. Pouvez-vous commenter la vente par Magnum de vos archives comportant un grand nombre de photos d’enfants identifiables, survivant·es d’abus sexuels (un crime au Royaume-Uni). Y compris les photos que vous avez prises avec le tag «prostituée», ce qui a conduit à la mise hors ligne des archives de Magnum. Nombre d’entre nous, dans la communauté de la photo, sommes préoccupé·es et c’est une question que les photographes Magnum semblent esquiver. Il y a beaucoup d’enfants sur ces photos et la protection des enfants est une préoccupation importante. MERCI.

Dans votre déclaration il y a quelques jours, vous avez dit : «Chez Magnum, nous apprécions toujours les observations et retours du public.
Peut-être pas vraiment Chris Steele-Perkins. Il est resté silencieux.

Malheureusement, l’histoire de cette photo ne s’arrête pas là. Une recherche d’image google renvoie à deux sites web.
L’un est celui de Magnum. L’autre s’appelle BL-LIT. «BL signifie boylove… La représentation de la nudité des mineurs rend le site Web controversé pour certains, même si tout le contenu est purement artistique».

J’ai envoyé le lien à un enquêteur “en ligne” à Interpol sur la maltraitance des enfants. Il m’a dit que c’était à la limite de la légalité, du bon côté, se cachant derrière «l’art», mais que la clientèle était claire. Le site web présente des centaines de galeries de garçons pré-pubères photographiés par les grands du monde de la photographie. Alignés par ordre alphabétique, de Diane Arbus à Weegee, et tous les autres entre les deux.

Il comporte également une page de liens vers ce que je ne peux que supposer être des sites pour pédophiles (je n’allais pas cliquer). Y compris «Pederasty Wiki» et «BoyLinks – La liste Internet la plus complète de sites Web sur les garçons et les boyloves». C’est exactement comme l’a décrit l’enquêteur. Abus d’enfants normalisés.

Deux clics à partir d’une recherche d’image google d’une photo Magnum.

Il y a une galerie de garçons photographiés par le photographe Magnum Christopher Anderson. Une photo, en particulier, se démarque. Son fils couché sur le ventre et nu sur un lit. J’ai fait un clic droit pour rechercher une image sur la photo et voici comment Google a lu l’image: «érotique».

Et les pédophiles aussi.

Dans une interview sur American Suburban X, Anderson a commenté la photo :

“Je suis constamment et toujours en conflit sur le fait de montrer des photos de mon fils, sur le fait qu’il m’en voudra peut-être plus tard … Il y a une photo en particulier de mon fils nu, vu de dos, et c’est une photo que j’ai prise quand il était assez jeune, mais à cause de l’angle et en quelque sorte de son physique, il a l’air plus vieux qu’il ne l’est en réalité. Je n’ai jamais pensé que ce serait controversé jusqu’à ce que d’autres personnes aient commencé à le signaler… Et parfois je me demande: «ai-je été le mac de mon enfant? Ou est-ce que je profite de la chair jeune de mon enfant d’une certaine manière ? »

Christopher Anderson, photographe Magnum

Cela vaut la peine de lire l’interview complète dans laquelle il parle de la discussion du consentement avec ses enfants (ce qu’il admet avoir oublié dans le cas d’au moins une photo), mais personne ne devrait douter de la destination de l’image de son fils. Un objet de collection sur les disques durs de centaines de milliers de pédophiles.

Je n’aimerais pas avoir cette conversation avec l’un de mes enfants après qu’ils aient googlé une photo d’eux-mêmes nus et découverts que j’en avais fait des objets de désir, et qu’ils ne peuvent absolument rien y faire s’ils se sentent violés.

Ce sont les artistes qui sont censés souffrir pour leur art. Pas leurs enfants. Et certainement pas les enfants des autres.

J’espère que cela agit comme un réveil pour vous et votre agence. Mais vous êtes tellement imbue de votre réputation d'”élite de la narration” que j’en doute fortement.

3 – Antoine d’Agata

Le photographe Magnum Antoine d’Agata est célèbre pour sa déshumanisation des femmes. Plus il y a de déshumanisation, mieux c’est. Apparemment, ça se vend. Ateliers. Impressions. Livres.

J’ai trouvé les photos suivantes après avoir recherché le mot «viol» dans les archives Magnum.

De quoi s’agit-il ? Fantasmes de viols masculin pour l’acheteur d’art qui peut se permettre plus que pornhub ? Qu’est-ce que les hommes de Magnum qui ont voté pour que d’Agata soit membre de l’agence apprécient tant dans ces photos qui déshumanisent les femmes et sont référencées sous le mot viol ?

Il y a un fort courant sous-jacent dans la culture Magnum qui vénère le photographe masculin qui aime le sexe / la drogue / les travailleur·es du sexe / se vantant de ses conquêtes ».

Dr. Alice Driver

Dans une interview filmée en 2012, d’Agata dit:

«Il y a quelque chose au Cambodge qui est très très loin de toute morale. Disons que c’est dans ces extrêmes que j’aimerais continuer mon travail. Pour voir s’il y a encore des limites pour moi ».

Antoine D’Agata

Coucher avec des travailleuses du sexe n’est pas éloigné de la moralité. C’est la norme pour un grand nombre d’étrangers qui se rendent au Cambodge. Et les artistes drogués sont un cliché à dix sous. .

Et regardez la photo ci-dessous. Est-ce que ce sont des enfants nus Olivia ? Pour moi oui.

Je pose cette question depuis le 22 août. C’est simple et je ne comprends pas pourquoi une organisation fondée sur le journalisme éluderait une telle question ?

En regardant cette photo, quelqu’un chez Magnum a-t-il pensé que d’Agata, appareil photo en main ou pas, pouvait représenter un danger pour les enfants ? Parce que votre silence sur cette question n’incite pas à la confiance. Et le silence sur les questions de protection des enfants est inacceptable.

Addendum : ce passage n’est pas dans l’article d’origine mais l’auteur nous a envoyé ce passage pour l’y insérer.

Le foyer a ensuite été perquisitionné et fermé parce qu’un grand nombre d’enfants y étaient victimes d’abus sexuels.Magnum vend les photos de ses archives sous le titre “Enfants violés”.

En gros, D’agata est allé dans un foyer pour enfants. Il a photographié des enfants qui ont été maltraités. Il a recréé les abus en les photographiant de dos, dans une pièce sombre, et Magnum vendait l’image intitulée “Raped Kids” “Enfants Violes”. Si vous faites ça au Royaume-Uni, vous êtes arrêté. Mais une des raisons pour laquelle des photographes comme d’Agata travaillent dans des pays comme le Cambodge c’est qu’on peut tout avoir à bas prix.

4. Stuart Franklin

En 2016, Magnum Photos a organisé un concours photo via le site Web Lensculture. Le jury était composé de Martin Parr, David Alan Harvey, Newsha Tavakolian et David Kogan de Magnum, ainsi que Stacey Baker (New York Times), Amy Pereira (alors MSNBC) et Jim Casper (éditeur de Lensculture).

Pour lauréate du prix du photojournalisme, iels ont choisi la série The Longing of the Others de Sandra Hoyn, consacrée à la vie des travailleuses du sexe au Bangladesh. L’une des photos montre un homme allongé sur une enfant qui a l’air visiblement en détresse. L’identité de l’homme est subtilement cachée.

Selon Hoyn, la fille a quinze ans. Elle a décrit la scène dans une interview avec le magazine Cosmopolitan :

“Parfois, je me sentais très mal à l’aise de prendre des photos. Mais je devais toujours me rappeler que je suis photojournaliste… Prendre des portraits de Pakhi, une jeune fille de 15 ans, avec un client qu’elle n’aimait pas du tout était une mauvaise expérience. Elle est comme une amie pour moi. J’avais l’impression de la maltraiter quand j’ai pris ces photos. Mais je me suis forcée à le faire, ça n’existerait pas si je ne le montrais pas. Son client est venu avec un groupe de cinq hommes qui voulaient tous avoir des relations sexuelles avec elle, les uns après les autres. C’était horrible.

Sandra Hoyn, photographer

En droit bangladais, un enfant ne peut pas consentir à des relations sexuelles rémunérées avec un adulte. Hoyn décrit un viol collectif. Et en plus, en s’arrangeant pour être dans la pièce, elle est complice de ce viol. Un enquêteur d’Interpol m’a dit que le «journalisme» n’était pas une défense, «au moment où vous prenez une photo d’un enfant violé, vous avez commis un crime». Au Royaume-Uni, identifier un enfant qui a survécu à une agression sexuelle est un crime. Si ces photos avaient été prises au Royaume-Uni, où les abus sexuels sur enfants sont un fléau croissant, où des enfants de 15 ans peuvent être achetés, alors Hoyn aurait probablement été arrêtée et inscrite au registre des délinquants sexuels sur enfants. Quand elle écrit «j’avais l’impression de la maltraiter», c’est parce que c’est ce qu’elle était en train de faire.

La série présente également une deuxième enfant (14 ans) visiblement en détresse avec les bras d’un violeur autour d’elle. Hoyn la décrit comme une «travailleuse du sexe» : la banalisation du viol comme un «travail» pour les enfants. Les jurés du prix l’ont adoré.

Le travail de Stuart Franklin de Magnum a ouvert la voie. En 2005, il s’est rendu au Niger pour prendre des photos d’esclaves. Voici comment il a sous-titré l’une des photos : «Memouna (14 ans), une esclave, avec sa fille d’un an et demi, Safia, conçue alors qu’elle travaillait comme prostituée». Pouvez-vous imaginer Franklin, qui est un britannique blanc, en train de prendre une photo d’une jeune britannique de 14 ans parfaitement reconnaissable, qui a été vendue et violée jusqu’à être enceinte et la sous-titrer ainsi : «prostituée au travail» ?

Ensuite, téléchargez la photo sur votre site Web pour téléchargement gratuit et autorisation de partager sur les réseaux sociaux avec le logo Magnum Photos ? Imaginez, Olivia, un photographe faisant ça à l’une de vos filles ou à l’un de mes garçons ?

Le viol décrit comme un «travail» pour un enfant. Horrible.

Cette colère que vous ressentez envers moi en ce moment, d’avoir osé poser cette question à vous et aux autres, est due au fait qu’en tant que parent, vous savez qu’il s’agit de mal-traitance d’enfants. Et la seule chose qui protège nos enfants d’un photographe comme Franklin et du reste des types effrayants avec qui vous partagez une agence, c’est que nous sommes à la fois blancs et éduqués. Demandez aux filles de Rotherham.

D’après la légende, Stuart Franklin pense que le viol est un travail pour un enfant. “Memouna, (14 ans) esclave…enceinte pendant son travail de prostituée”
En vente ce soir Che Magnum Photos. Tags inclus : emploi d’enfant, prostituée, esclave.

Franklin a répondu à mon tweet en me bloquant. Cependant, la photo a été retirée des archives Magnum après que je l’ai signalée. Mais à partir d’aujourd’hui, des images de Mounna, sous-titrée «prostituée au travail», sont toujours en vente sur des sites web tiers, trois ans et demi après que Magnum ait affirmé que la protection de l’enfance était d’une «importance capitale».

Si quelqu’un qui lit ceci se demande encore pourquoi tant de photographes veulent photographier des enfants maltraités, c’est parce que votre agence Magnum a rendu la pratique rentable. Vous la valorisez. Et vous avez l’habitude d’encourager les autres à le faire.

Les photos de Hoyn ont ensuite été récompensées dans au moins 15 autres concours photo. 15. Est-il étonnant que l’année suivante le concours Magnum / Lensculture ait été annoncé sur Facebook avec la photo de Souvid Datta d’une autre enfant sud-asiatique qui aurait été violée ?

Le marché connaît sa cible. Plus les images sont déshumanisantes, mieux c’est.

Ce n’est qu’après que je sois parti en guerre, avec un très petit nombre d’autres personnes contre la publication des images de Datta et Hoyn, que des organisations comme Lensculture ont eu honte jusqu’à les supprimer. Jusque-là, il s’agissait simplement de «journalisme» récompensé. Le pire du photojournalisme est une usine auto-satisfaite de maltraitance d’enfants avec Magnum pour huiler la machine.

5 – Larry Towell et Paolo Pellegrin

Dans une ancienne vie, j’ai mis sur pied et aidé à diriger un projet de santé pour les jeunes en Éthiopie, axé sur la santé sexuelle et reproductive. Les jeunes femmes et hommes racontaient à la radio leurs histoires d’amour et de séparations. Certains témoignages douloureux dépassaient l’imagination. Mariage précoce, mutilations des organes génitaux des femmes, VIH, interdictions de fréquenter le garçon ou la fille que vous aimez. Rêves à haute voix et rêves écrasés.

En moyenne, nous recevions 100 lettres par jour de jeunes avec des questions pour Hanna, notre compatissante “tante”. Nous avons raconté les histoires de nombreux enfants séropositifs. Mais une chose que nous n’avons jamais fait, pour leur propre sécurité, a été de les identifier, même s’ils le voulaient. Les conséquences pouvaient être fatales.

Combien d’enfants parfaitement identifiables Magnum Photos a-t-il déclarés séropositifs sur votre site web et d’autres ? Trop pour que je les compte. De jeunes enfants qui ne peuvent pas consentir, emballés comme un produit par Magnum et vendus comme si vous faisiez au monde une immense faveur. Certains enfants sont si jeunes qu’ils ne savaient probablement ni ne pouvaient comprendre leur statut. Objets.

Dans mon tout premier tweet sur vos archives l’année dernière, j’ai inclus une photo prise par Larry Towell dans un bidonville de Lima en 2006 (la même année où je travaillais en Ethiopie). La photo montre un jeune enfant extrêmement vulnérable assis dans le coin d’une pièce et a été taguée «prostitution» et «VIH» dans les archives Magnum.

Sur d’autres sites, les mot-clés étaient «beauté caucasienne» «produit premium» «malade» . La légende présente l’enfant comme séropositif.

Même après votre déclaration, vous avez continué à vendre cette image sur au moins trois sites différents jusqu’à mon tweet du 11 novembre où je vous ai fait tellement honte que vous avez dû la retirer.

@MagnumPhotos et @larrytowell1 vendent une photo qui montre un jeune enfant péruvien extrêmement vulnérable et séropositif. Les tags sur Magnum comprenaient “3-13” et “Prostitution”.J’ai écrit pour la première fois sur cette photo le 6 août.

Mes commentaires à ce sujet sur twitter en novembre dernier restent d’actualité :

@larrytowell1 sait qu’il ne pourrait pas faire ça au Canada. Et comme il a souvent photographié ses propres enfants, il doit comprendre qu’une photo de vous vendue sur le web, prise par un homme que vous avez brièvement rencontré, qui ne parlait pas votre langue, révélant votre statut VIH, et portant la mention “prostituée” sur la photo, est une exploitation.

Et cela ne peut se produire que parce qu’il a du pouvoir et pas vous. C’est un grave problème de protection de l’enfance.

Au lieu ce ça, @MagnumPhotos se cache derrière une société de communication de crise qu’ils ne sortent que lorsque ils veulent cacher quelque chose, pendant que leurs photographes comme @larrytowell1 qui commettent, à mon humble avis, une forme d’abus sur les enfants devraient cesser de se comporter comme des lâches.

Ceux d’entre eux qui ont un peu de décence devraient commencer à avoir une conversation sérieuse et ouverte sur ces questions. Pas juste se contenter de supprimer les photos sur un site et continuer de les vendre sur d’autres en espérant qu’elles disparaissent.

Si @MagnumPhotos et ses photographes avaient collectivement eu une quelconque compréhension de la protection des enfants, ces photos seraient hors-ligne depuis le 7 août. Le lendemain de mon alerte. Depuis lors, chaque jour n’est qu’un doigt d’honneur à la face des enfants sur les photos qu’ils exploitent.

Et puis il y a Paolo Pellegrin qui se promène dans un hôpital roumain, entre et sort des chambres, prenant des photos parfaitement identifiables de très jeunes enfants séropositifs, dont certains semblent être dérangés et effrayés par sa présence. Je suppose que si vous connaissez le travail de Pellegrin, rien de tout cela ne vous surprend.

Le maître de Magnum en matière de photos coups de poing. C’est exactement ce regard que les rédacteurs en chef de photos comme Kathy Ryan adorent.

Parmi les tags figurant sur les photos d’enfants séropositifs, on trouve “maladie vénérienne”.

Après mes tweets, vous avez silencieusement retiré les images.
Et n’avez rien dit.

  1. Un problème pas vraiment “historique”

En août dernier, lorsque les archives de Magnum ont été temporairement mises hors ligne, vous avez écrit : “Nous avons également été avertis de la présence dans nos archives de matériel historique qui pose problème en termes d’image, de sous-titrage ou de mots-clés”.

Cette photo, que j’ai trouvée dans vos archives cette année, est intitulée “Trophée”. Elle a été prise par le photographe Sohrab Hura de Magnum en 2018 ; elle est apparue avec la recherche du mot “viol” et a également été indexée “viol”. Elle n’est en aucun cas “historique”.


J’ai eu une conversation des plus surréalistes avec Hura, au cours de laquelle il m’a dit qu’il n’avait aucune idée de la façon dont sa photo avait été étiquetée “viol”, car il s’agit en fait d’une photo de trois de ses amis masculins qui s’amusent. Il m’a également dit que personne à Magnum ne pouvait lui expliquer comment sa photo a été étiquetée “viol”.

J’ai eu d’autres conversations avec les photographes et le personnel de Magnum qui m’ont confirmé ça et m’ont dit que les archives sont fondamentalement pourries. Elles ont été indexées au rabais et il n’y a pas eu de véritable contrôle de qualité. C’est un problème culturel dans l’agence où les photographes sont présentés comme “l’élite de la narration” et n’ont pas à assumer la responsabilité de la façon dont Magnum vend leur travail. Et Magnum cherche à conditionner les images de toutes les manières possibles pour en tirer un profit. Indépendamment de l’intégrité journalistique de base.

Magnum ne montre aucun respect pour les personnes présentes sur les photos. C’est déjà assez grave quand il y a tant d’adultes vulnérables, mais quand il s’agit d’enfants vulnérables, c’est un problème urgent de protection de l’enfance.

Et si vous aviez besoin d’une preuve de plus, jetez un coup d’œil à Patrick Zachmann.

7 – Patrick Zachmann

C’est un enfant qui tête une bouteille. Nu à partir de la taille. Il joue avec son pénis. Qui est en érection. Et jusqu’à ce que Fstoppers montre la photo, Magnum était tout à fait heureuse de la vendre dans leurs archives. (Je ne vais pas montrer l’image, même modifiée pour des raisons de décence, mais on peut la voir dans l’article de Day).

Olivia, quel genre de personne prend une photo comme celle-ci pour essayer de la vendre ? Et quel genre d’organisation essaie de la vendre ? Et qui l’achète ?

Silence. C’est assourdissant. Encore une fois.

Finissons là où nous avons commencé. Avec un agresseur en Thaïlande. “Une jeune fille avec son client dans un hôtel ; il est facturé 12 $”. mots-clés : “Travail d’enfant”, “Prostituée”, “Adolescente”.

En d’autres termes. Venez en Thaïlande ! Vous pouvez violer une jeune fille. Pour très peu d’argent. Et ne vous inquiétez pas, ce n’est pas vous que le “journaliste” montrera à la caméra. Ce n’est pas vous qu’il cherchera à exploiter et à dénoncer.

La fille sur cette photo, si elle est toujours vivante, a probablement le même âge que vous maintenant, Olivia. Forcée à travailler dans l’industrie du sexe.

A-t-elle obtenu un supplément pour que Zachmann soit dans la chambre ? Et d’autres questions profondément troublantes. Vous ne répondrez à aucune d’entre elles.

Une autre série : Zachmann prend des photos sur une plage thaïlandaise lorsque la police fait une descente et arrête des “prostitués”. Sauf qu’il ne s’agit pas de prostitués. Ce sont de jeunes garçons qui ont été violés par des étrangers.

Zachmann les prend en photo alors qu’ils pleurent, alors qu’ils essaient de se cacher de l’appareil photo. Et il continue. Même lorsqu’ils sont emmenés au poste de police.

Une forme d’abus d’enfants, encore est encore. Au bout de la chaîne des abuseurs. Cherchant à faire du profit. Au vu et au su de tous. Magnum Photos.

Sur la photo ci-dessous, le garçon que vous essayez de vendre au monde comme “prostitué” pleure. C’est déchirant.

Et c’est ainsi que les photos d’enfants payés pour être violés par des étrangers et packagés et vendus comme “prostitués” par Magnum ont fini par être diffusées. Un site web fétichiste “gay” xxx. Les résultats de Google apparaissent côte à côte.

8 – L’avenir

Dans une interview donnée à Tom Seymour au Art Newspaper l’année dernière, Robert Godden a expliqué comment Magnum pourrait aller de l’avant.

Magnum doit faire preuve de transparence au sujet de la sélection des photos. La meilleure façon serait de faire appel à un expert indépendant, de rendre public sa mission, y compris la manière dont Magnum traitera les résultats de la sélection, et de le publier une fois qu’elle aura été réalisée. Ils doivent rétablir la confiance. Cela ne se fera pas en gardant l’éditing en interne.

Robert Godden

J’imagine que tout le monde chez Magnum a été ébranlé par le fait que plus de 600 professionnel·les ont signé·es une tribune demandant que Magnum rende des comptes. Le code de conduite que vous avez refusé à plusieurs reprises de publier est miraculeusement apparu. Et chaque jour, nous attendons une politique de protection de l’enfance.

Il est beaucoup trop tard pour les enfants qui figurent sur les photos, depuis des décennies. Les enfants dont les photojournalistes affirment souvent qu’ils sont “sans voix”. Un moyen pratique de s’assurer que les victimes de cette industrie ne seront jamais entendues.

L’histoire nous apprend que pour se débarrasser de ces histoires d’abus, il suffit de revendiquer sa supériorité, de prendre le pouvoir et de cibler les personnes vulnérables. Les photos de Magnum ont excellé dans ce domaine et, de ce fait, il est pervers pour moi que quiconque dans l’industrie reconnaisse Magnum comme modèle. C’est comme s’ils n’avaient pas encore entendu la voix des survivants.

Il savait qu’il pouvait s’en tirer. Il savait qu’il n’y a pas de protection pour les femmes comme moi.

Patience Zalanga (qui n’est pas une des victimes) le crucifie en trois tweets ci-dessous.

Je n’ignore pas que beaucoup de femmes ciblées par David Alan Harvey (de Magnum Photos) sont des femmes de couleur. Ce n’est pas une coïncidence. C’est intentionnel.

L’industrie a un besoin urgent de nouveaux dirigeants et de nouvelles institutions. Sisonke Msimang a raison.

Commencer de nouvelles choses, alors que les anciennes sont déterminées à être ce qu’elles ont toujours été, est un travail difficile, mais plus productif que de chercher à brûler ou à réformer. Asséchez les vieilles structures et elles tomberont.

Sisonke Msimang

J’espère que vous reviendrez à ce que vous faites de mieux Olivia, à savoir prendre des photos. Et Magnum, asséchée, deviendra un sac d’os. On se souviendra de l’agence pour avoir produit quelques-unes des plus grandes œuvres photographiques du XXe siècle et un tel sentiment de pouvoir sur le corps des femmes et des enfants, qu’il sera bien difficile de comprendre ce qu’il s’est joué au-delà de la simple décence.

Je suis de plus en plus convaincue que le racisme et le touries de “sauvetage” font partie de l’ADN de certaines institutions.

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Si vous tombez sur une image ou une vidéo que vous jugez indécente, veuillez le signaler ici.

J’ai changé le surnom de mon ancien professeur de maths parce que c’était une insulte homophobe.

Pour en savoir un peu plus sur l’histoire et le regard des photos de Magnum, je vous recommande de lire ce fil de John Edwin Mason.

Remerciements

Andy Day a effectué une grande partie des recherches présentées dans le post. Je lui suis redevable en tant qu’être humain qui fait en sorte que les enfants sont plus importants que les photos.

Amanda Mustard a été une voix constante appelant au changement dans l’industrie. Cela n’est pas sans conséquences et ce n’est pas mérité.

Chaque personne derrière la tribune appelant à la responsabilité. Le fait que 600 personnes l’aient signée a été un grand moment dans l’histoire de la photo et a forcé Magnum à repenser la voie autodestructrice qu’elle suit.

Kristen Chick n’a jamais renoncé à vouloir raconter l’histoire des femmes envers lesquelles Harvey a agi de manière inappropriée.

Les 11 femmes qui lui ont parlé étaient incroyablement courageuses.

Jonny Bark était assis dans le bureau de Duckrabbit avec moi en août lorsque nous avons découvert la plupart des informations contenues dans ce post. Il a été d’un grand soutien.

Je suis reparti avec beaucoup de respect pour Sohrab Hura. Cela a dû être brutal de découvrir comment sa photo était vendue, mais il n’a jamais été sur la défensive ou dédaigneux. Je recommande vivement la lecture de son essai très réfléchi sur la photographie des marginaux.

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